Une modification de la loi rend les restructurations jusqu'à 20 % plus coûteuses pour l'employeur
15 mei 2023
En raison d'une modification de la loi, les opérations de restructuration impliquant des licenciements collectifs sont en moyenne 5 % plus chères depuis le 1er janvier 2023, avec des valeurs extrêmes atteignant jusqu’à plus de 20 %. Ce coût supplémentaire de licenciement est distinct de l’augmentation du coût due à l’indexation et aux augmentations barémiques. En effet, il résulte d'une modification récente de la loi qui supprime le remboursement de ce coût par l'ONEM. SD Worx, qui a accompagné un licenciement collectif sur trois en 2022, a calculé l'impact sur la base d'un échantillon réel de collaborateurs licenciés dans le cadre de licenciements collectifs au cours de la période 2021-2022.
Licenciement collectif
L'existence d'un « licenciement collectif » dépend du nombre de travailleurs licenciés sur une période de 60 jours. Le nombre exact de travailleurs dépend de la taille de l'entreprise[1]. Par exemple, il est déjà possible de parler d’un licenciement collectif lorsque 10 salariés sont licenciés.
Pacte de solidarité entre les générations
En 2005, le Pacte de solidarité entre les générations prévoyait que les entreprises procédant à des licenciements collectifs devaient mettre en place une « cellule pour l'emploi ». Les travailleurs étaient alors fortement encouragés à s'inscrire auprès de cette cellule afin de pouvoir recevoir une « indemnité de reclassement » d'un montant de :
- 3 mois de salaire, si le salarié est âgé de moins de 45 ans au moment de l'annonce du licenciement collectif
- 6 mois de salaire, à partir de 45 ans.
Cette indemnité de reclassement est compensée par l'indemnité de licenciement normale ; elle peut en être déduite. Toutefois, il est également possible que cette indemnité de reclassement soit supérieure à l'indemnité de licenciement normale. Cela signifierait donc un coût supplémentaire pour les employeurs : le licenciement dans le cadre d'un licenciement collectif serait alors plus coûteux qu'un licenciement ordinaire.
Pour éviter cela, le Pacte de solidarité entre les générations prévoyait que l'employeur pouvait réclamer ce surcoût à l'ONEM, et ce sans limitation. C'est ce que l'on appelle dans le jargon le « volet B » de l’indemnité de reclassement, c'est-à-dire la partie de cette indemnité qui dépasse l'indemnité de licenciement normale.
Suppression de l'intervention de l’ONEM
Cette intervention est supprimée depuis le 1er janvier[2]. L'employeur ne peut plus réclamer à l'ONEM le surcoût de ces indemnités de reclassement si le licenciement collectif a été annoncé après le 1er janvier 2023. Concrètement, cela signifie que les travailleurs continueront à percevoir ces 3 ou 6 mois de salaire, même si leur délai de préavis est en réalité plus court. Toutefois, à partir de maintenant, ce coût supplémentaire sera supporté par l'entreprise.
Impact calculé sur la base d'un échantillon réel de 2582 travailleurs
Les consultants de SD Worx ont supervisé 21 des 61 licenciements collectifs annoncés en 2022, ce qui fait de SD Worx l'expert absolu en termes d’expérience dans la matière.
Le spécialiste a ainsi pris un échantillon représentatif de 2582 travailleurs sur la période 2021-2022 et a calculé le coût total des licenciements prévus par la loi, ainsi que le coût des licenciements qui auraient suivi cette nouvelle législation :
- Le coût supplémentaire total est de 5,12 %.
- Le coût supplémentaire moyen est de 5,08%
- Le coût supplémentaire médian est de 2,34%
- L'impact varie de 0 % à 21 % : il y a des entreprises pour lesquelles la restructuration serait 21 % plus coûteuse.
Autres conséquences possibles
L’indemnité de reclassement ne s'applique qu'en cas de licenciement collectif. Cela signifie qu'un certain nombre de salariés sont licenciés au cours d'une période de 60 jours. Toutefois, si le même nombre de licenciements est effectué sur une période cette fois plus longue, il ne s’agit pas de licenciement collectif.
Si le coût du licenciement légal augmente, cela peut avoir un impact sur la marge de manœuvre disponible pour les engagements extralégaux (ce que l'on appelle un « plan social »). En effet, les budgets déjà engagés par la loi ne sont plus disponibles pour des mesures de soutien extralégales.
Marc Morren précise : « Le coût légal du licenciement sera plus élevé à la suite de la modification de la loi, ce qui peut avoir un impact sur la marge de négociation qui subsiste pour l'élaboration d'un plan dit social. Dans un peu plus de 10 % des licenciements collectifs, le plan social se limite d'ailleurs à l'application de la loi, sans engagements extra-légaux. »
Comparer des pommes avec des poires
Il arrive que l'on veuille comparer ou étalonner les plans sociaux en exprimant le plan social extralégal en pourcentage du coût du licenciement légal. Selon les experts de SD Worx, il n'est pas judicieux de déterminer l'ampleur d'un plan social extralégal sur la base du coût des indemnités légales. En effet, le prix de revient de ces indemnités légales évolue et dépend fortement de la situation individuelle de l'entreprise. Comparer des plans sociaux revient donc souvent à comparer des pommes avec des poires. De plus, on crée alors un effet d'amplification : lorsque le budget extralégal est exprimé en pourcentage des frais légaux, les entreprises qui ont déjà un coût de licenciement légal élevé se retrouvent avec un point de référence plus élevé.
« Comparer les plans sociaux revient souvent à comparer des pommes avec des poires. Trop souvent, les avantages sociaux sont répertoriés et comparés sans tenir compte des indemnités légales de licenciement qui étaient d'application », conclut Marc Morren, expert en concertation sociale chez SD Worx
[1] Pour plus d'informations sur les seuils du licenciement collectif, consultez le e-book
[2] Loi 26 décembre 2022 - B.S. 30 décembre 2022